Centre d'Etudes et de Recherches

sur les Phénomènes Inexpliqués


Le diablotin

Un jour, ou probablement plutôt un soir, je ne sais plus comment cela se fait toujours est-il que je me trouvais, tout jeune garçonnet, dans le grand lit de ma grand-mère, avec ma maman à côté de moi.  Je n'ai aucune explication à ce qui s'est passé cette fois là, mais j'en conserve un souvenir extrêmement vivace, ineffaçable même, c'est comme si cela se passait hier.

Venu de ne je sais où, un diablotin fit une irruption fracassante dans la chambre !

C'était un spectacle pratiquement indescriptible tant il était agité, d'une turbulence inouïe et d'une rapidité phénoménale.  Il courait d'un côté à l'autre de la pièce, bondissait dans tous les sens, passait sous le lit dans lequel il donnait alors de grands coups, le faisant sursauter et nous obligeant à nous accrocher à ce que nous pouvions.

Ma mère n'en menait pas large mais essayait de tenir son calme, elle me dit simplement: "Surtout ne bouge pas !"
Franchement, ce conseil était tout à fait superflu car j'étais tétanisé, pétrifié, je n'aurais pas bougé pour tout l'or du monde.  Pensez !  Je n'avais pas dix ans, loin s'en faut, et le spectacle qui s'offrait à moi était bouleversant !

Cela ne se prolongea guère plus de quelques minutes, voire quelques secondes, mais cela m'apparut comme une éternité.  Je ne savais pas comment tout cela allait finir !  
Mais soudain, le vacarme se tut et le diablotin disparut comme il était venu, tout aussi mystérieusement.

Ce qui s'était passé avant et après la scène, je serais bien en peine de vous le dire, seul cet épisode est resté gravé dans ma mémoire à tout jamais.  Sans doute provient-il de mon imagination d'enfant, peut-être n'avais-je fait qu'un mauvais rêve.  Seulement, cela paraissait si réel qu'aujourd'hui encore rien que l'évocation de ce souvenir me hérisse les poils et me donne la chair de poule.

Ma mère ne semble avoir gardé aucun souvenir de cette scène, c'est la raison pour laquelle, avec le recul, je finis par douter de la réalité du phénomène.  Mais mon esprit, quant à lui, s'y refuse obstinément et pour lui il s'agit d'une affaire classée : cela avait bel et bien eu lieu.

Après coup, un détail m'est venu.  Que ce soit à la maison ou en classe, on ne parlait jamais de "diablotins", j'ignorais que cela ait seulement une forme d'existence, même hypothétique, le mot n'existait pas encore dans mon vocabulaire.  La raison était simple : lorsqu'il nous arrivait de parler de religion, en dehors des sujets traditionnels, on ne parlait que du diable et jamais de sous-fifres.  Dans mon entendement d'alors, lequel ne laissait aucune place aux allégories, le diable n'était évoqué que sous la forme d'une entité représentée comme à l'âge adulte.  Les éventuels cours de catéchisme reprenaient ce même principe et en aucun cas ils ne présentaient d'entités au format de poche.  S'il s'était agi d'un rêve, mon esprit aurait du restituer ce dont il avait entendu parler et n'avait théoriquement aucune possibilité d'inventer une entité dont il ne pouvait avoir conscience.

Je n'ignore pas toutes les objections et haussements d'épaules que pourraient suggérer cet article ni le fait que la présente narration pourrait n'être finalement que le reflet d'une imagination enfantine plus ou moins fertile, influencée par un contexte particulier et une éducation orientée.  De nos jours, on évoquerait une paralysie du sommeil.  C'est peut-être de cela dont il s'est agi.  Mais j'ai des doutes !  De gros doutes et vous ne tarderez pas à savoir pourquoi. 

Naturellement, ce phénomène médicalement reconnu peut toucher n'importe qui et est, somme toute, relativement fréquent.  (On estime que près d'une personne sur deux vivra l'une de ces expériences au cours de sa vie) mais je suis moins sûr que cela puisse toucher un jeune enfant en raison des causes qui amènent généralement le phénomène : stress, anxiété, fatigue, etc.  Mes heures de sommeil étaient forcément bien réglées (intervention parentale), pas de stress connu (mais c'est difficile à apprécier si longtemps après !)  J'ai pourtant connu d'autres expériences de paralysie du sommeil, mais bien plus tard, à l'âge adulte, et j'ai parfaitement pu faire la distinction.  Dans le cas présent, il n'y avait ni contexte hypnagogique ni hypnopompique.  Voilà qui, au moins, est certain !  NEfin, paralysie du sommeil ou pas, cela n'expliquerait toujours pas l'innovation ou l'invention mentale à laquelle j'aurais du m'atteler pour faire surgir, même au niveau onirique, une notion que je ne possédais pas !  Néanmoins, il subsistera toujours une zone d'ombre.  Aussi je reste circonspect quant à l'affirmation de la réalité du phénomène dont le souvenir est pourtant si vivace en moi, malgré l'éloignement chronologique.   Pendant de longues années, je me suis interrogé quant à cette expérience hors du commun, que certains auront tôt fait de cataloguer au rang des rêveries (ou cauchemars) et ma plus grande déception est de ne pouvoir apporter aucune preuve concrète. 

J'estime que je devais avoir six ou sept ans à l'époque des faits  (soit vers 1964-65) et je ne vois aucun point qui ait pu me suggérer un tel rêve.  J'ai notamment pensé à mes lectures possibles d'alors, ce qui m'a permis de retrouver de nombreuses couvertures des hebdomadaires Tintin (et il me semble que dans un album de Tintin, les méchants finissent harcelés par de petits diables rouges) ou Spirou, Pilote, etc. mais les dates ne correspondent pas, ni les descriptions dans les seules et rares occurrences possibles.  Les recueils de BD oubliées, telles que http://www.bdoubliees.com/journaltintin/annees/1964.htm mettant en scène Jari et un diable rouge sont totalement hors propos.  Les seules revues qui évoquent un réel souvenir (et que j'ai conservées jusqu'à l'aube des années 80) datent de 1969 et sont donc largement ultérieures aux faits, loin s'en faut. Mes premiers cours de catéchisme eurent lieu alors que nous résidions à Ollignies, soit après les faits également.  Une image assez forte provient toutefois d'un livre issu de cours de religion de première ou deuxième année primaire (donc possible) et met effectivement un diable rouge évoluant sur un enfer traditionnel.  Il s'agit pourtant là aussi manifestement d'un adulte et certainement pas d'un diablotin.  Mes recherches sur le Net n'ont pas plus été couronnées de succès.  Tout au plus ai-je pu trouver l'une ou l'autre image ressemblant très grossièrement à ce que j'ai vu, la première image (haut de la page à gauche) étant la plus proche, les deux autres étant de plus en plus caricaturales. Quoi qu'il en soit, je crois qu'il est presque impossible, quarante ans après les faits environ, de retrouver les raisons indirectes qui auraient pu influencer un enfant. Le mystère restera donc probablement entier et nous le classerons volontairement parmi les témoignages "douteux".  Il est vrai que l'on ne peut guère apporter de crédit à une telle narration émanant du souvenir d'un enfant de six ou sept ans à peine... Il faudra toutefois apprécier la suite des événements...

Une suite qui se présente sous la forme des sabots dont la trace resta figée dans le balatum de la chambre.
Mais alors, direz-vous : nous la tenons, cette fameuse preuve concrète ?  Non, certainement pas.  Et pour plusieurs raisons : d'abord, même si l'on pouvait observer ces empreintes, rien ne prouverait qu'il s'agirait de celles d'un diablotin.  On pourrait lui donner toutes sortes d'origines différentes et évoquer aussi al supercherie.  Ensuite, parce qu'il se fait qu'avec le décès de ma grand-mère, la maison ne resta pas dans le patrimoine familial : elle changea de propriétaire, lequel y fit de nombreuses transformations et je doute qu'il ait conservé un vieux balatum, surtout s'i devait présenter des traces de sabots...

 http://missrebelle128.centerblog.net/rub-Diablotin-3.html (le blog d'où sont issues les images figurant sur cette page, apparemment sans copyright)