Centre d'Etudes et de Recherches

sur les Phénomènes Inexpliqués


Le bibliothécaire fantôme

Vers la fin des années 70, début des années 80, l'un de mes passe-temps favoris consistait à me rendre à Bruxelles et à parcourir la capitale à la recherche d'anciennes lignes de trams. C'est notamment chez un bouquiniste de la rue du Midi, à quelques pas de la place Rouppe, entre la rue des Pierres et celle-ci, que je trouvai un "magnifique" exemplaire d'un horaire de trams datant des années 50. Enfin... magnifique pour moi car il comportait à peu près tout ce que je cherchais en matière de lignes et de numéros de trams, bien que les choses demeuraient encore fort abstraites (pas de photos naturellement) Ce petit bout de carton m'a permis de reconstituer ou de dater de nombreux éléments qui m'étaient obscurs.
Mais je recherchais aussi des photos de trams. Pas forcément les plus anciens mais surtout les trams de la STIB. Comme vous vous doutez, c'était surtout le tunnel sous la gare du Midi qui m'intéressait le plus (j'en parle ailleurs en tentant de comprendre cette passion pour les anciens tramways), de même que certains tronçons particuliers. Il y avait aussi ce mythique tram 14, dont mes parents m'avaient beaucoup parlé et que je n'avais jamais vu passer, ni remarqué en images ou en photo, où que ce soit. Il y avait encore la place De Brouckère, bien entendu, ou certaines curiosités locales, notamment le terminus de la ligne 19 qui faisait le tour de la place Saint-Denis à Forest.
A l'époque, je n'avais pas de but précis dans ces recherches, j'était guidé avant tout par la nostalgie et une curiosité inexplicable. Je ne pouvais absolument pas savoir que j'étais sur les traces de personnages mystérieux, de sociétés secrètes ou ce genre de choses.

Tout en promenant un peu partout dans les différentes communes de l'agglomération, je parcourais de toutes petites rues parfois très escarpées, dans lesquelles d'anciennes voies témoignaient du passage des véhicules de jadis. Mais il était difficile de croire que d'aussi lourdes motrices, parfois tirées par des chevaux, arrivaient au sommet ou parvenaient à prendre des virages aussi serrés. J'imaginais des problèmes insolubles lors des heures de pointe, pendant lesquelles les conducteurs des trams bondés devaient demander aux voyageurs de descendre pour pousser, ou des descentes vertigineuses et catastrophiques semblables à celles des montagnes russes.
Je passais aussi de petit commerce en bouquiniste, à la recherche de cartes postales d'autrefois, de revues, de livres cartonnés et puis, quand il m'arrivait d'en trouver qui m'intéressent, je me trouvais confronté à un autre dilemme : mon argent de poche ne suffirait pas à les acheter dans leur totalité, j'allais devoir revenir, mais l'exemplaire en question risquait d'être vendu entre temps ! Voilà qui était inconcevable, mais aussi incontournable, sauf si je parvenais à m'arranger avec le marchand.

Je ne me souviens bien sûr plus du trajet exact que j'avais parcouru, cette fois-là. Cela devait se situer, je crois, du côté de la gare du Nord. J'avais pris le premier tram venu, m'étais mis dans le fond et, en attendant que les gens avancent, je regardais le paysage qui défilait derrière moi.

Quand je me suis enfin retourné, j'ai été un peu surpris de me trouver dans un modèle de véhicule assez peu récent. Il était toutefois très vraisemblable que la STIB les exploite encore car différents types, datant d'époques très différentes, étaient encore utilisés simultanément. Je tiquai quand même en voyant un poste de contrôle avec un poinçonneur en fonction. Là, quelque chose n'allait pas ! Il s'agissait en effet d'une occupation qui avait disparu depuis plusieurs années au profit de systèmes automatiques. Mais ce dernier se contenta de me regarder avec un sourire en coin et de me faire signe de passer. Je vis pourtant les accessoires traditionnels qui étaient à sa disposition et dont il ne subsisterait que les vestiges, plus tard, dans les musées. J'eus le temps de remarquer aussi que le conducteur, ou le wattman si vous préférez, utilisait un rhéostat (je veux parler ici du système de contrôle tel qu'on peut le voir ici). Hé bien, décidemment, on devait conduire ce tram pour un film documentaire ou quelque chose comme ça ! Je m'y serais bien attardé, me serais peut-être aussi mis à poser une kyrielle de questions au risque d'importuner le personnel, mais mon attention fut attirée par une vitrine splendide qui aurait du faire mon bonheur, si bien que je me hâtai de sonner pour demander l'arrêt. Je revins sur mes pas à partir de l'arrêt pour entrer dans une petite rue typique.

Certains magasins étaient de véritables bric-à-brac dans lesquels on trouvait de tout et même ce qu'on cherchait. Il y avait aussi des espèces d'antiquaires qui disposaient de petites collections parfois très intéressantes, enfin il y avait aussi de ces endroits enchanteurs dans lesquels j'adorais passer des heures et des heures à compulser mille bouquins. 

Ce jour là, c'est dans l'un de ces endroits que je m'étais rendu au petit bonheur la chance: une magnifique bibliothèque qui ressemblait un peu à ce que vous voyez sur l'image ci-dessus. Ces veilles bibliothèques, avec des étagères jusqu'au plafond et du bois partout m'ont toujours fasciné. Un aspect respectable, un peu ou beaucoup de désordre parfois, de l'érudition partout, des trésors de culture à disposition, c'est un petit paradis !

Comme la boutique était momentanément vide, je commençai à fouiner dans tous les coins.  Il ne fallut pas longtemps avant que je tombe sur certains bouquins richement illustrés, avec mille endroits d'un Bruxelles révolu, sillonnés de tramways aujourd'hui disparus. Je regardais un tram occulté qui s'avançait dans une rue d'Anderlecht pendant la guerre et sous une pluie battante lorsque j'entendis tousser derrière mon dos. Je me retournai et vis un vieux monsieur tout voûté, portant une grosse barbe poivre et sel. Il s'agissait très certainement du bibliothécaire.

Je peux peut-être faire quelque chose pour toi, petit ? se contenta-t-il de me dire d'une voix un peu chevrotante. 
Je m'emberlificotai alors dans les balbutiements d'une réponse que j'espérais cohérente mais n'arrivai à sortir que des bribes de phrases dépourvues de sens.
Le bibliothécaire tendit alors un doigt mince vers l'ouvrage que je tenais en main et reprit :

"Tu cherches le tram 14 à ce que je vois..."

L'affirmation du vieillard était pour le moins hasardeuse ou bien sa vue devait avoir besoin d'une sérieuse correction s'il faisait allusion à ce que je tenais sous les yeux. Mais en replongeant mon nez dans le livre, je hoquetai de surprise !
Il ne s'agissait absolument pas d'une rue d'Anderlecht mais du bas de l'avenue Wielemans-Ceuppens à Forest, à une époque très reculée, bien antérieure à la seconde guerre mondiale à en juger par le type de tram illustré et le jaunissement de l'épreuve. Par ailleurs, le tram n'était nullement occulté (pendant l'occupation, certains trams durent circuler en coiffant leur phare de devant, probablement pour respecter le couvre-feu) et il ne pleuvait pas du tout. A l'avant du tram, outre des passants qui circulaient librement sur la place, on distinguait nettement le numéro : un 14 ! Qu'était-ce cela pour une sorcellerie ?  La page à laquelle je me trouvais aurait-elle tourné pendant que ce monsieur me parlait ? Après tout, ce n'était pas impossible. Toutefois, le fait d'être arrivé par hasard sur l'image d'un tram 14 représentait une coïncidence tout à fait remarquable !

"Tu trouveras aussi des informations intéressantes sur le terminus du 19, à la place communale de Forest, lorsqu'il en faisait encore le tour complet ou sur le 58 et ses couleurs sportives mais méfie-toi du 16 ! Quant au 14, un aveugle t'y guidera par nuit noire!"

Je le regardai éberlué, ne comprenant rien à ce qu'il disait. Comme mon étonnement était visible et que je m'apprêtais à le questionner sur ses propos bizarres, il balaya l'air de la main comme pour m'imposer le silence et continua :

"Il faut que tu saches que le temps n'est pas comme une ligne de tram et pourtant, parfois cela y ressemble. Il y a un terminus départ et un terminus arrivée, mais le chemin est parsemé d'aiguillages qui permettent de nombreuses variantes. Certaines lignes se croisent et empruntent le même chemin pendant un certain temps, d'autres pas. Les lignes qui t'intéressent sont comme autant de gares ferroviaires de formation, il y a beaucoup de diversité. Mais il faut compter avec les autres réseaux..."

Je parvins quand même à l'interroger :
"Excusez-moi, mais je ne suis pas sûr de comprendre ce que vous voulez me dire ni où vous voulez en venir..."
Il fit la moue et répondit :

"C'est normal, chaque chose en son temps... Contente-toi de bien retenir ce que je t'ai dit!" et pour en être certain, il répéta les quelques phrases qu'il venait de me dire, y compris les premières. Puis, il s'excusa et sous prétexte d'aller chercher un autre document, repartit dans son arrière-boutique.

Mais il ne revint jamais ! Au bout d'un certain temps, je m'en allai voir du côté de la porte du fond et l'appelai sans obtenir aucune réponse. J'attendis patiemment pendant un bon bout de temps puis, comme ce magasin semblait vouloir rester éternellement vide, je m'en allai, sans emporter le livre, bien entendu.

Cette expérience suscita évidemment de nombreuses interrogations auxquelles j'essayai de trouver autant de réponses. Je ne les ai pas obtenues toutes en même temps. Selon moi, la première chose qu'il convenait de faire était de revenir sur les lieux dès le lendemain, en espérant qu'il ne s'agisse pas justement du jour de fermeture.

Je ne pus jamais retrouver la bibliothèque en question malgré que j'aie remonté à pied le parcours du tram. Il n'y avait aucune rue à l'endroit où elle aurait du se trouver ! Comprenez bien : les maisons voisines existaient bien et je les ai évidemment retrouvées telles qu'elles étaient, mais il n'y avait aucun coin là où la rue devait commencer. Les façades se suivaient sans interruption et à en juger par leur aspect, elles devaient se trouver là depuis des décennies ! Or donc, aucune trace non plus de cette bibliothèque ! Je ne comprenais rien à cet état de choses, il était impossible que j'aie rêvé tout cela...

Recherches faites, aucun tram de type ancien n'avait circulé là la veille et personne ne put me confirmer que l'on prévoyait de tourner un film dans le coin, un film dans lequel on aurait eu besoin de ce genre d'élément.
Il me restait les propos du vieil homme et le souvenir de ce que j'avais vu dans son livre. Au sujet des images, il me fallut attendre fin 2007 - début 2008 pour en trouver de semblables !
Pour ce qui est des phrases prononcées par cette vieille personne, il faut distinguer ce qui n'a été qu'interprété et ce qui a trouvé des coïncidences réellement frappantes. Ainsi, l'affaire du 14 mérite d'être citée, 
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Le bibliothécaire ne pouvait pas savoir, en ce qui concerne le tram 19, que mes parents allaient venir habiter près de la place Saint-Denis, ou place communale de Forest, ni que le terminus allait voir sa configuration raccourcie... Le point concernant les couleurs sportives du 58 est, selon moi, à interpréter car il est assez difficile d'y voir un élément réellement convaincant.  Le 58 avait un film rouge et vert, mais il n'était pas le seul à disposer de ces couleurs comme je le croyais jadis, c'était aussi le cas pour le 62, entre autres.  Le rouge et le vert sont aussi les couleurs des armoiries de la ville de Lessines où j'habitai longtemps avec mes parents, il s'agit aussi des couleurs de l'équipe de football où je jouai était jeune, l'Union Lessinoise.  Enfin, Lessines est aussi la ville où je pratiquai le plus de sport, mais toute analogie s'arrête là.  Peut-être ne suis-je pas allé voir assez loin où la concordance n'a-t-elle pas encore eu lieu...
Si l'on s'en réfère aux trams, je n'avais bien sûr aucune raison de me méfier plus particulièrement du 16, mais on a vu que les similitudes pouvaient être entachées de très légères différences puisqu'elles sont issues d'allusions.  La plus "belle" concordance à ce sujet réside dans l'affaire de l'accident de moto que je connus en 1985, à Saintes, en revenant du dancing "Le Miami", place De Brouckère.  Cet accident eut lieu le 16/09/85 ; 
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Note sur les photos : en reconstruisant ce site, j'ai rapatrié des terras de documents de toutes sortes et notamment d'images, en provenance de l'ancien site. Ce dernier était alimenté, entre autres, par quantité de correspondants qui avaient pour consigne d'être respectueux des droits d'auteurs mais qui n'ont peut-être pas toujours suffisamment surveillé ce point. Dans l'état actuel des choses, face à cette quantité colossale, je ne peux pas tout vérifier. ce serait humainement impossible ! Si certains s'estiment lésés des publications figurant ici, j'attire leur attention sur les points suivants :
- Il y a absence totale de mauvaise intention de ma part.
- Il y a absence totale de but commercial (le CERPI a toujours été totalement bénévole et le restera. Je n'ai pas changé d'optique)
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En tout état de cause, retenez bien que je ne veux nuire à personne, pas plus que j'apprécie que l'on me nuise. Si vous êtes concerné, veuillez dès à présent accepter mes excuses !