Opération Paperclip

Pour la petite histoire, il est bon de rappeler que l'on prétend - et nous avons tout lieu de le croire - que ces armes de représailles firent plus de morts du côté de ceux qui les lançaient que de celui de ceux qui les recevaient. Comment est-ce possible ? Outre les incidents qui pouvaient survenir lors du décollage, c'est surtout la production de ces armes secrètes" qui se montrait cruellement éprouvante : les nazis utilisaient de véritables esclaves humains issus de leurs camps pour se livrer à une grosse partie du travail et cela dans des conditions épouvantables dans lesquelles de pauvres bougres mouraient de faim, de soif, de fatigue et autres mauvais traitements. Ils étaient exploités jusqu'à la dernière extrémité. Sans vergogne. Mais ni les V1 ni les V 2 n'eurent l'impact espéré par les allemands sur le déroulement de la guerre. Sans doute parce que, en dépit de leurs efforts, les nazis ne purent les produire en quantité suffisante, les perfectionner assez rapidement et aussi, il faut bien le dire, par manque de chance. En effet, s'ils avaient pu concentrer un tir nourri sur les forces prévues pour le débarquement en Normandie, il en serait peut-être allé tout autrement. Seulement voilà, les choses ne se passèrent pas ainsi et personne ne s'en plaindra. Par exemple toujours, les V1 manquaient de précision et frappaient donc un peu au hasard. Les Alliés trouvèrent assez vite le moyen de s'en prémunir, parfois au cours de manoeuvres audacieuses il est vrai.

Il y eut aussi les fameux Me 262 (pour ce qui est des armes "secrètes" ouvertement reconnues comme authentiques. Il s'agissait en fait des premiers avions à réaction, lesquels étaient doués de performances époustouflantes pour leur époque et surclassaient allègrement tous leurs adversaires. Malheureusement pour les allemands, cet avion souffrait également de certaines imperfections et relativement peu de ces appareils participèrent à des combats (une centaine). Quant à Hitler, il s'obstina - dit-on (mais cette information est contestée), à le transformer en bombardier. Quoi qu'il en soit, on peut considérer que dans un cas comme dans l'autre, ce qu'il manqua au IIIè Reich, ce fut le temps. Le temps de perfectionner tout cela et de le produire en quantités suffisantes. Là non plus, on ne s'en plaindra pas... Il y eut bien d'autres armes secrètes, soit potentiellement épouvantables, soit à la limite du loufoque, de grandes idées et de grosses déceptions, ou encore des espèces de compromis entre toutes ces polarités. Nous n'avons ici, volontairement, évoqué aucune arme secrète supposée farfelue, issue de la science-fiction ufologique qui nappe ce conflit mondial de mystère. Mais il convient d'en venir maintenant au sujet de ce dossier : l'opération paperclip.

Car si on voulait prétendre que l'allemagne nazie ne disposait pas de l'avance qu'on lui prête, comment aurait-on pu justifier cette opération, tenue top-secrète pendant 28 ans (???), qui consistait à identifier près de 1500 ingénieurs et scientifiques allemands afin de les récupérer pour profiter de leurs compétences ? Les américains, apparemment initiateurs de ladite opération, furent imités par les russes, mais aussi les anglais, les français et les argentins et peut-être d'autres encore, mais avec des moyens plus limités.
Les Russes s'en servirent au profit de leurs systèmes de propulsion de fusées, les français pour leur airbus et d'autres encore pour certaines réalisations telle qu'un modèle particulier d'hélicoptère. Encore cette liste est-elle loin d'être exhaustive.

Il existe même une polémique, ou plutôt une énigme, quant à la fameuse bombe atomique. Les allemands furent bien près de l'avoir avant les américains et l'on tremble en pensant à ce qui serait arrivé si les choses en avaient été ainsi. On se demande toujours comment le troisième Reich ne gagna par cette importantissime course contre la montre. Il suffit, à ce propos de lire 'L'énigme Heisenberg" pour s'en convaincre et éventuellement se forger son opinion personnelle. Certains vont jusqu'à avancer que des savants traînèrent les pieds dans cette "œuvre" car ils étaient horrifiés à l'idée qu'une telle invention tombe aux mains d'Hitler. Ce serait alors la première fois que l'on applaudirait le manque d'ardeur au travail !
Mais le fait est là, historique et sans bavure, les USA s'approprièrent bel et bien quantité d'éminences grises aux dépens de l'Allemagne, depuis février 1945 et ce jusqu'en 1957, date à laquelle l'Allemagne protesta de ce qu'on la dépouille de ses scientifiques. Dans certains cas, les Alliés n'eurent pas vraiment besoin de forcer leur talent pour s'approprier les trouvailles nazies. Ainsi, certains pilotes de Me 262 venant d'être capturés après que leur appareil ait subi une avarie, durent en expliquer le fonctionnement à leurs vis-à-vis, non sans que cela ne se soit fait les larmes aux yeux et avec une colère non dissimulée.
Lorsque l'on rit des théories conspirationnistes et de la désinformation, il faudra désormais se rappeler que l'opération paperclip ne fut pas seulement rendue publique après la bagatelle de vingt-huit années d'occultation incontestable, mais aussi de ce que ses protagonistes ne firent aucun cas des ordres de leur président, lequel refusait catégoriquement que des sujets nazis, de près ou de loin, soient utilisés sur le sol américain. On s'empressa de ne plus tenir aucun compte de ce que leurs nouvelles recrues aient été des criminels de guerre, les pires qui soient, des nazis endurcis et esclavagistes en diable, pourvu qu'ils servent leur nouveau pays d'adoption. Ils furent subitement lavés de leurs crimes, nantis des papiers nécessaires (attachés à leurs dossier pour la circonstance, d'où le nom d'attache-trombone - en anglais : "paperclip"), naturalisés et récupérés pour la rétro-ingénierie, le développement aéronautique et la conquête spatiale, entre autres.

Les savants ainsi récupérés ne furent nullement affectés à des rôles subalternes. Au contraire accédèrent-ils à des postes très enviables et à responsabilités. L'une des plus belles illustrations à ce propos se trouve sans conteste dans l'exemple de Von Braun qui fut l'un des artisans majeurs des premiers pas sur la lune. Cette opération démontre donc deux choses essentielles :
1) Si les savants allemands avaient disposé d'un peu plus de temps, ils auraient pu donner le tournis aux Alliés grâce aux perfectionnements apportés à leurs armes. Peut-être même auraient-ils pu développer certains modèles de type OVNI qui ne dépassèrent guère le stade de prototypes, nonobstant le problème lié à l'approvisionnement en matières premières et au carburant.
2) Si la théorie du complot reste une théorie sujette à caution, il ne fait absolument aucun doute que les USA sont capables des pires mensonges et de désinformations, couvrant de très longues périodes de temps. Somme toute, d'une certaine manière, ils démontrent que la théorie du complot n'est pas forcément aussi inepte ou absurde qu'elle ne paraît. Quand on cache, c'est que l'on a à cacher et l'opération paperclip démontre que ce qui est à cacher n'est pas toujours joli-joli.
Bien sûr, certains diront que la présente récupération constituait une façon de laver les crimes commis en mettant la science au profit de l'Humanité, la conquête de la lune fut profitable à l'étude scientifique et eut des répercutions sur notre quotidien. Je ne suis pas persuadé que les innombrables personnes qui ont péri à la tâche que leur imposaient les scientifiques allemands, directement ou indirectement, l'entendraient de cette oreille. Je ne suis pas sûr que la conquête de la lune justifie la mort et la torture de milliers d'innocents, souvent choisis arbitrairement et ce n'est pas une guerre qui servira d'excuse. Le crime reste intolérable.
Il y aura moyen d'envisager les choses sous de nombreux angles. Certains diront par exemple que ces scientifiques auraient fait beaucoup plus de tort encore en restant dans leur mère-patrie. Dans un géant mort et sous contrôle ? Ces connaissances auraient été perdues à tout jamais ? Pas forcément. Sans doute auraient-elles été différées. Après tout le savoir n'attend que d'être acquis. Les considérations humaines demeurent à mon sens essentielles, mais l'on s'engage là sur un débat sans fin.
Le plus important, en ce qui concerne nos objectifs, reste de savoir ce qui a exactement pu être récupéré en matière de connaissances, de technologie et de science et ce qui en a été fait. Nous ne connaissons qu'une partie de ce qui apparaît (progressivement) à visière abattue - pour des raisons militaires évidentes - mais rien de ce qui nous a été caché. Cela paraît une lapalissade. En attendant, il reste à chercher.
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