Centre d'Études et de Recherches

sur les Phénomènes Inexpliqués

Ian Stevenson et la réincarnation

Ian Stevenson décrit, à l'intention du grand public, les recherches qu'il a effectuées durant 25 ans sur des cas d'enfants qui disent se souvenir d'une vie antérieure. Il explique la façon dont il a mené ses recherches, les résultats importants qu'il a obtenus et les conclusions qu'il en a tirées.

Ian Stevenson était psychiatre, directeur des études comportementales au département de psychiatrie à l'université de Virginie.

Le texte qui suit reprend les parties intéressantes pour moi d'un des ses ouvrages : «Les enfants qui se souviennent des leurs vies antérieures» (Sand, prix : moins de 20 euros - à l'époque où fut rédigé ce texte !). Ce texte n'est donc ni une synthèse ni un résumé. Mais tout ce qui est dit ici est repris de son livre. Les chiffres entre parenthèses reprennent le numéro de page.

Je ne suis lié, ni de près, ni de loin, à la vente de cet ouvrage, j'essaie ici simplement de partager, avec les lecteurs, les renseignements exceptionnels de ce livre. Il est si rare qu'une étude sérieuse soit menée dans ce domaine.

Stevenson écarte tout d'abord deux types de cas où l'on ne peut trouver aucun processus paranormal : ceux dont la personnalité antérieure décrite par l'enfant ne correspond à aucun défunt connu et ceux dont le défunt – identifié – appartient à la famille du sujet ou à son voisinage. Le premier dispense Stevenson d'enquête sur la paranormalité du phénomène, puisqu'on ne peut rien vérifier. Dans le deuxième, on n'arrive presque jamais à avoir la preuve que l'enfant n'a pas été normalement influencé par ce qu'il a vu et entendu autour de lui (cependant, les cas de ces deux catégories peuvent comporter d'autres aspects susceptibles de retenir notre attention : marques de naissance ou comportement insolite)(129).

Stevenson est persuadé que la fréquence des cas est bien supérieure à celle des rapports de la presse. Il a fait faire un sondage dans une région de l'Inde, il y avait 19 cas pour mille habitants (91).

Il y 5 caractéristiques principales des «cas». Elles ne sont que rarement présentes dans tous les cas :

1) Pré-vision de réincarnation (92).

Certains tentent de choisir leur prochaine vie avant de mourir, accompagnant leur choix de souhaits sur leur nouvelle apparence physique ou leurs qualités. On ne rencontre que cette caractéristique chez les Tlingits ou les Tibétains (22% des cas chez les Tlingits) (93)

2) Rêves annonciateurs (93).

Dans cette caractéristique, généralement quelqu'un d'apparenté au futur sujet rêve d'un défunt qui lui fait part de son intention ou de son désir de se réincarner. Le «rêveur» est souvent une épouse, mère éventuelle du sujet qui va re-naître. Parfois, c'est le mari, ou un parent, ou un ami qui reçoit le message en rêve. On a appelé ce phénomène «rêve annonciateur» parce qu'il se produit, à de rares exceptions près, avant la naissance ou quelquefois même avant la conception du sujet.

3) Marques et défauts de naissance. (95).

Les sujets ont parfois des marques sur le corps, qui correspondent à des blessures ou marques congénitales de la personnalité antérieure.

Les défauts et marques de naissance correspondant à ceux du défunt constituent, selon Stevenson, les meilleures preuves pour justifier la croyance en la réincarnation. Ce sont des taches bien visibles. Stevenson en a photographié des centaines.

4) Propos des enfants sur leur vie antérieure. (96)

Un enfant qui se rappelle sa vie antérieure commence en général à en parler vers l'âge de 2 ans, et à l'oublier vers l'âge de 5 ans. Les souvenirs peuvent se limiter à quelques «flash-back» ou, au contraire, couler à flots. (99) L'enfant tend à se rappeler surtout les événements de la dernière année, des derniers mois et jours de sa vie précédente. Environ trois quarts des sujets affirment revoir leur mort, et avec plus de précision encore lorsque la mort a été violente (dans les cas authentifiés, 94 % des sujets parlaient de leur mort – par accident ou meurtre – contre 52 % lorsque la mort avait été naturelle (141)). Les souvenirs sur les personnes ou objets qui entouraient l'ancienne personnalité pendant les derniers temps de son existence ont priorité sur tout le reste. Les sujets ont habituellement retenu le nom de leur ancienne personnalité et son entourage.

La plupart des sujets n'ont rien à nous révéler sur la période intermédiaire entre la mort de l'ancienne personnalité et leur propre naissance. (100)

Beaucoup de sujets affirment qu'ils reconnaîtraient leurs parents ou amis antérieurs si on les amenait sur les lieux de leur ancienne incarnation. C'est ce qui s'est produit dans de nombreux cas : ces «visites» ont permis aux sujets de se retrouver parmi ceux qu'ils avaient aimés ou simplement connus. Stevenson attache peu d'importance à ces rencontres car elles ont sont rarement contrôlées par des observateurs impartiaux. Lors de la rencontre, l'enfant est mis souvent tacitement sur la bonne voie. Il y a pourtant deux sortes de circonstances où la re-connaissance peut-être considérée comme positive (102) : - Celle où l'enfant reconnaît spontanément quelqu'un qu'il voit pour la première fois par hasard; - Celle où la rencontre a lieu dans des circonstances très contrôlées.

5) Comportement des sujets (104).

Les sujets ont souvent un comportement insolite dans leur famille, et qui rentre dans l'une ou l'autre des catégories suivantes (ou dans les deux) :

 - L'enfant manifeste son émotion à l'idée de revoir la famille de son ancienne vie, selon les sentiments qu'il lui portait. S'il était heureux avec elle, il demandera peut-être à la rencontrer, et son comportement correspondra à celui de son ancienne personnalité vis-à-vis d'elle;

- Réactions (frayeurs inexpliquées, préférences, habilité spéciale ou intérêt insolite pour des gens ou des choses) inhabituelles dans la famille du sujet, mais familières à l'ancienne personnalité ou à son entourage. On ne trouve généralement rien dans la vie actuelle du sujet pour expliquer ces réactions.

Les phobies relatives aux circonstances de la mort de l'ancienne personnalité ont particulièrement frappé Stevenson, et elles sont fréquentes. La peur de l'eau, la terreur des armes à feu correspondent à une noyade ou à un assassinat par balle. Ces enfants ont tendance à généraliser leurs aversions. Les préférences pour certains mets, le dégoût de certains autres forment une catégorie importante. (104)

Beaucoup de sujets gardent l'impression d'être encore des adultes, et apparaissent ainsi à leur entourage, c'est-à-dire plus mûrs que leur âge. Ils ont une attitude de condescendance vis-à-vis des autres enfants. Les sujets ont souvent un sens des responsabilités qui manque aux enfants normaux. On peut leur confier des tâches ménagères ou autres bien plus tôt qu'à l'habitude. (106)

Les sujets qui ont changé de sexe d'une incarnation à l'autre (selon leur propre témoignage) ont intéressé particulièrement Stevenson par la persistance du comportement antérieur. Leur façon de jouer, de s'habiller, de parler, reflète le genre de leur personnalité précédente (106).

La xénoglossie (112) est la connaissance d'une langue que le sujet n'a pas apprise. Les cas authentiques de xénoglossie contribuent largement à prouver la survivance après la mort. Cependant, fort peu de sujets, même s'ils se rappellent avoir habité un pays différent dans une autre vie, sont aptes à comprendre ou à en parler la langue. Néanmoins, il semble qu'ils l'apprennent plus vite que leurs frères et sœurs quand on leur enseigne.

Le comportement insolite des sujets, plus conforme à celui de l'ancienne personnalité qu'à celui de leur entourage, a d'abord étonné Stevenson. Il mit encore plus de temps à se rendre compte que ces comportements pouvaient aussi aider les psychologues et les psychiatres à expliquer certains types de comportements jusqu'ici mystérieux, ainsi que certains phénomènes biologiques et médicaux dont on ne connaît pas la cause (155). C'est ce que je développerai ci-dessous : 1) Comportements insolites dans l'enfance :

 - Phobies.

Les psychiatres pour enfants savent que certains enfants ont des phobies que ni eux ni les parents ne peuvent expliquer. Si nous nous limitons à la vie de l'enfant pour rechercher les causes d'une phobie, nous échouerons très souvent, il nous faut enquêter ailleurs.

Les phobies sont généralement liées à la façon dont l'ancienne personnalité du sujet à trouvé la mort.

Par exemple, sur 47 noyés parmi les anciennes personnalités, 30 sujets avaient la phobie des bains ou de l'eau, et sur 23 cas de mort par morsure de serpents, 9 sujets avaient peur des serpents.

 - Jeux et intérêts insolites chez l'enfant (157).

Certains enfants s'intéressent à des matières ou à des activités qui n'ont aucun rapport avec le genre de vie ou le caractère de leurs familiers. Les théories courantes sur la personnalité ne peuvent expliquer de façon adéquate les vocations écloses dès l'enfance malgré l'indifférence ou l'opposition de l'entourage. L'influence d'une vie antérieure est une bonne hypothèse, même en l'absence de souvenirs imagés (159).

 - Aptitudes ou habilités innées chez les enfants.

Il s'agit d'enfants qui peuvent faire des choses sans jamais les avoir apprises. Stevenson note l'insuffisance de preuves concernant ces enfants prodiges (160).

 - Caractères.

Nombreux sont les sujets qui présentaient dans leur caractère des ressemblances frappantes avec celui de l'ancienne personnalité dont ils se souvenaient : activité débordante, promptitude aux colères…

- Sexualité précoce.

Quelques-uns des sujets manifestaient dans leur enfance une attirance sexuelle pour l'épouse, la maîtresse ou la fiancée de leur ancienne personnalité, d'autres allant même jusqu'à faire des avances à des personnes de sexe opposé qui ressemblaient à leur partenaire dans leur vie précédente. Ce type de comportement se retrouve exclusivement chez les sujets dont l'ancienne personnalité était décédée en plein épanouissement sexuel (162).

 - Identité sexuelle confuse.

Les enfants qui affirment avoir appartenu au sexe opposé dans leur vie précédente le prouvent généralement par leur comportement. La majorité d'entre eux s'adaptent peu à peu à leur nouvel état. Ceux dont l'ambiguïté ou la réticence persistent sont peu nombreux (163).

 - Différences insolites entre vrais jumeaux (monozygotes).

Stevenson a observé 36 paires de jumeaux dont l'un ou tous les deux se rappelaient leur vie antérieure. Dans 26 de ces cas, on avait pu identifier un défunt pour chacun des jumeaux. 19 des 26 paires avaient été soit mariés l'un à l'autre, soit membres de la même famille. Les 7 paires restantes avaient été amis ou relations, mais jamais étrangers l'un à l'autre.

Les vrais jumeaux ont le même matériel génétique. Le facteur génétique intervient de façon évidente : parmi les vrais jumeaux élevés ensemble, lorsque l'un d'eux a un bec-de-lièvre, il y a 38 % de chances pour que l'autre l'ait également (pour les faux jumeaux, la proportion n'est que de 8 %). Néanmoins, il y a environ deux tiers des monozygotes chez qui on ne trouve pas cette concordance. Il doit donc exister un autre facteur que le facteur génétique afin d'expliquer que cette malformation n'affecte qu'un des vrais jumeaux. Stevenson avance celle d'une mémoire provenant d'une vie antérieure.

Quant aux frères siamois : un des premiers spécialistes en la matière, Newman, a fait remarquer que les frères siamois différent l'un de l'autre, dans leur caractère, encore plus que les vrais jumeaux. Les frères siamois ont tous deux le même matériel génétique et, encore plus que les jumeaux, le même environnement : nous nous attendons naturellement à les trouver aussi ressemblants dans leur personnalité que physiquement. Stevenson présume que leurs différences sont dues à la mémoire comportementale héritée de vies antérieures dissemblables (167).

 - Relations entre parents et enfants.

Certains enfants peuvent avoir un comportement inexplicable vis-à-vis de leurs parents. Stevenson émet l'hypothèse que ceci est dû au fait qu'ils se sont connus dans la vie antérieure (167).

 - Agressivité irrationnelle.

Stevenson pense à cet antagonisme apparemment irrationnel que manifestent certaines personnes envers certaines autres, individus ou collectivités. La forte proportion de morts violentes parmi les anciennes personnalités des sujets a permis d'étudier comment les sentiments peuvent être transmis d'une incarnation à d'autre, comme par exemple, le désir de vengeance contre un assassin. Certains pardonnent et les autres pas … En grandissant, l'enfant ressent de moins en moins de colère contre son agresseur. Le ressentiment d'un sujet peut s'étendre jusqu'à l'entourage de l'agresseur, ou même du milieu auquel il appartenait : l'antagonisme se manifeste alors contre le groupe en question, par exemple tous les agents de police, les musulmans, etc. … De là à détester une nation ou une race  (NDLR : ce terme est apparemment devenu obsolète, voire indésirable) entière, il n'y a qu'un pas … (169)

A propos de la réincarnation, Stevenson écrit ceci (196) :

«Il faut avoir l'habitude d'une chose pour y croire. Mais il ne suffit pas de connaître l'idée de réincarnation pour en juger impartialement les preuves. Ainsi, certains de mes collègues occidentaux, d'autres en Asie et en Afrique, me font comprendre, sinon explicitement, du moins par des allusions ou des sourires, que mes recherches sont un gaspillage d'argent. Cependant, les deux camps en donnent des raisons différentes : les confrères occidentaux pensent que la réincarnation est une fable. Ceux d'Afrique ou d'Asie disent que c'est un fait établi qui n'a aucun besoin d'être démontré. Aucun d'eux n'avait eu connaissance de cas concrets dont les preuves auraient pu modifier leur opinion.»

Je conclurai avec ces quelques mots de Stevenson (139) :

«Ce livre à lui tout seul ne peut convaincre le lecteur. Je souhaiterais simplement, et plus modestement, qu'il donne envie de lire mes autres travaux, où les rapports sur les cas sont plus détaillés. J'exhorte mes lecteurs à fixer leur attention sur les détails.

Si vous lisez ces rapports détaillés, vous ne direz plus, je pense, qu'il n'y a aucune preuve de la réincarnation. Peut-être les trouverez-vous insuffisantes ? Je serai alors en droit de vous demander : «Quelle preuve, si vous l'aviez, pourrait vous convaincre ?»

Texte proposé par Christian