Les trams en
sous-sol
Pour
mieux comprendre l'état de choses à Bruxelles, l'évolution du réseau de
tramways et ce qui va suivre dans le domaine du mystère, il est
nécessaire de remonter un peu dans l'histoire.
Il n'y avait jadis à
Bruxelles, que deux grandes gares : celle du Nord et celle du "Midi"
encore que cette dernière appellation n'est pas tout à fait exact.
La première gare à pouvoir être assimilée à celle du Midi fut celle de
"L'allée verte" avant de migrer vers les Bogards et la place Rouppe puis
de devenir l'actuelle gare "du Midi".
Rien que cette gare du Midi implique un dossier à part tant le sujet est
également riche. Les deux gares en question étaient des gares
"terminus" ou gares cul-de-sac comme on en connaît partout ailleurs
(Anvers en Belgique, Paris, etc.)
La situation
géographique de Bruxelles en a fait un carrefour de l'Europe et la
configuration des deux gares posait de gros problèmes aux personnes qui,
par exemple, désiraient se rendre en train de Paris à Amsterdam.
Une fois arrivés à Bruxelles-Midi, il leur fallait traverser la capitale
pour rejoindre Bruxelles-Nord et pouvoir poursuivre leur route. Il
ne faut faire un dessin à personne pour expliquer à quel point la
traversée de toute capitale peut être longue et éprouvante, c'était déjà
le cas il y a bien des décennies, ce n'est d'ailleurs pas non plus
demain que cela changera. Le plus simple pour ces voyageurs,
étaient de prendre le tram du Midi au Nord ou vice versa. Dès
lors, il n'est pas étonnant que le tram occupa une place très importante
dans la vie de la ville, principalement en ce qui concerne les
boulevards qui rallient les deux gares. Si on se base sur une
ligne aussi droite que possible (et donc la plus courte), il faut donc,
en partant de la gare du Midi, emprunter le boulevard Maurice Lemonnier,
le boulevard Anspach, franchir
la place De Brouckère et ensuite le
boulevard Adolphe Max ou éventuellement le boulevard Émile Jacqmain.
On arrive alors au Centre Rogier qui précède directement la garde du
Nord. Il s'agit là d'un trajet dont vous avez déjà entendu parler
dans d'autres pages et à d'autres sujets.
Avec son million
d'habitants "seulement", Bruxelles fait un peu figure de naine parmi les
capitales européennes. Ce serait toutefois oublier le nombre de
navetteurs qui viennent quotidiennement travailler dans la cité de
Saint-Michel, celui des étudiants qui fréquentent les innombrables
écoles en venant de la périphérie, l'ensemble des personnes qui viennent
faire leurs courses dans la capitale, les militaires, etc. auxquels il
fallait donc ajouter les personnes de plus en plus nombreuses qui
traversaient la ville pour affaires. Or donc, pendant la journée,
la population de Bruxelles ne double pas, elle ne triple pas, elle ne
quadruple même pas, elle décuple littéralement et les problèmes de
circulation prennent évidemment toute leur ampleur. Sans compter
les éternels problèmes de parking, bien que jadis ceux-ci étaient moins
épineux que maintenant pour la simple raison qu'il y avait moins de
voitures en circulation. Cela ne signifie toutefois pas que
c'était une partie de plaisir, loin de là !
De 1960 à 1970, le
passage d'une gare à l'autre, en tram, devenait parfois, c'est vrai, un
véritable parcours du combattant dans lequel il convenait de s'armer
solidement de patience. Le seul fait de partir de la garde du Midi
et de rallier le boulevard Maurice Lemonnier constituait une difficulté
majeure car il fallait traverser le boulevard du Midi, une autre très
grosse artère faisant partie de la "petite ceinture" (pourtour du
centre-ville), sans compter que nombre d'autres rues y aboutissaient
également, bref : c'était la pagaille ! C'est certainement là qu'il
faut voir l'une des raisons du percement de ce fameux tunnel dont j'ai
déjà tant parlé.
Plus
de cinquante ans avant la deuxième guerre mondiale déjà, un projet de
jonction existait de manière à assurer la continuité entre les deux
grandes gares, mais il fallut attendre 1952 pour en voir l'inauguration.
Encore que beaucoup de bruxellois auraient largement préféré ne jamais
la voir ! En effet, en dépit des facilités octroyées par une telle
entreprise, elle fut très controversée, c'est le moins qu'on puisse
dire ! Elle apparut même comme une pure hérésie et il faut bien
dire qu'elle défigura complètement la ville, la transforma en un
abominable chantier perpétuel, précipita et généralisa la destruction de
remarquables édifices, des trésors d'architecture, entraîna la
disparition complète de plusieurs quartiers très populaires de
Bruxelles, mettant à mal une partie très importante de son folklore le
plus vif, de ses rues les plus animées et populeuses, ruina nombre de
marchands, provoqua d'innombrables tragédies sociales, laissa des traces
indélébiles dans une capitale déjà très cruellement éprouvée et une
rancoeur sans nom derrière elle... Les bruxellois, très durement touchés
par ces bouleversements qui les traumatisèrent au plus profond
d'eux-mêmes, la locution n'est vraiment pas trop forte ! ne sont
généralement pas au courant de ce qu'une grande... Pardon : une énorme !
partie de ces travaux fut absolument inutile. Le massacre inhumain
se poursuivit en sous-sol et en coulisses. Il se préparait
d'ailleurs de longue date, à l'insu de tous, soigneusement dissimulé à
grands renforts d'expropriations, de palissades, d'interdictions et
d'accès réservés.
A contrario, l'image
ci-dessus est un véritable régal pour moi car elle présente un 81 qui
sort de son tunnel à la gare du Midi, comme il le faisait jadis.
Sur cette image, bien peu de choses ont changé, sauf qu'il s'agit d'une
motrice du nouveau modèle. Malgré tout, je n'ai jamais aimé la
ligne du 81...
Bon ! Mais qu'est-ce qu'on en a à cirer me
direz-vous ? Tout cela nous fait une belle jambe !
Patientez donc et
souvenez-vous bien de cette ligne 81 ! S'il devait s'agir d'une
impression d'ordre médiumnique, cela ferait une réussite importante car
il y a eu jusqu'à plus de cent lignes de trams à Bruxelles et en tirer
un numéro précis serait un hasard vraiment prodigieux...
Je ne résiste pas à la
tentation de vous présenter, sur la photo de droite, un 39 qui part en
sous-sol, probablement du côté de la porte de Namur, tant pour mon
plaisir personnel et nostalgique que pour la rareté de la photo, au même
titre que la précédente. Si vous en trouvez de pareilles,
n'hésitez pas à me faire signe !
Elle n'a pour seul but
que de démontrer que le tunnel qui avait ma prédilection était loin
d'être le seul, à noter toutefois que, historiquement, le tunnel
Lemonnier fut le premier du réseau, tout comme la Belgique fut une
initiatrice en matière de jonctions.
On pourra certainement
se demander encore longtemps si elle eut pleinement raison d'innover en
l'occurrence... toutes les innovations ne sont pas heureuses !
Nous ne le saurons
finalement un jour qu'à la condition que les investigations du CERPI
soient totalement couronnées de succès. A défaut, elle sont en
très bonne voie...
Afin de nous permettre
de continuer notre investigation en toute connaissance de cause, il est
nécessaire ici de citer certains points historiques. Par exemple,
le fait que la STIB n'ait été créée qu'en 1954 peut paraître tardif
puisqu'il existait des trams à Bruxelles bien avant cette date, et fort
heureusement d'ailleurs. Il existait cependant auparavant d'autres
sociétés telles que la société des Tramways bruxellois. Il y a
aussi eu le SNCV, entre autres. Remarquons donc que la STIB,
emmenée longtemps par un personnage politique important de la capitale,
Guy Cudell pour ne pas le citer, ne fit son apparition que peu après la
guerre. Ce point revêtira toute son importance à la lecture de la
suite du dossier et viendra confirmer mes hypothèses. Il est
également nécessaire de mettre les travaux de restructuration du réseau
de trams bruxellois en rapport avec ceux qui ont concerné la fameuse
jonction Nord - Midi. Expliquons-nous !
Amusant de constater ce que l'on dit de Guy Cudell
dans l'astrologie chinoise en sachant qu'il est "serpent de feu" :
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Il y a tout juste 50 ans la
jonction Nord-Midi était inaugurée par le Roi Baudouin.
Construite au coeur de notre capitale, elle en a
irrémédiablement changé le visage mais elle a aussi
assuré le lien primordial du nord au sud.
La galerie de
photos des travaux
4 octobre 1952, le jeune Roi Baudouin inaugurait en
grande pompe la jonction Nord-Midi. Celle-ci fait deux
kilomètres à peine mais ce pas de puce dans l'espace
est, en fait, un pas de géant dans le réseau ferroviaire
européen.
Imaginez des voyageurs en provenance de Paris, devant
s'arrêter à Bruxelles-midi et emprunter un tram ou un
métro pour rejoindre la gare du Nord et poursuivre
ensuite leur voyage vers Amsterdam ou l'Allemagne. C'est
le miracle de cette aorte ferroviaire : relier le nord au
sud, l'est à l'ouest en raccourcissant incroyablement le
temps et les distances pour tous ses usagers. A
l'inverse, les capitales de Paris ou Londres ont
toujours des gares en cul de sac. Jusqu'en 1952, les
trains internationaux qui arrivaient à Bruxelles,
repartaient dans l'autre sens et empruntaient une rocade
ouest pour rejoindre ensuite l'autre gare !
50 ans plus tard, la jonction Nord-Midi est devenue
un passage obligé emprunté chaque jour par 140.000
usagers. Entre 1200 et 1300 trains passent
quotidiennement sur ses six voies souterraines. Ils sont
jusqu'à 85 par heure pendant les heures de pointe !
Si la jonction s'est très vite imposée dans notre vie
quotidienne, il en a été tout autrement pour sa
conception et sa construction. L'idée d'établir une
jonction entre les gares du Nord et du Midi remonte au
XIXème siècle mais il a fallu attendre 50 ans, pour que
les premiers coups de pioche soient donnés et tout
autant pour voir l'achèvement des travaux. Entre-temps,
deux guerres mondiales ont éclaté interrompant à chaque
fois le chantier. Ce dernier a transformé le
centre-ville en une immense tranchée, séparant la ville
basse de la ville haute, soulevant les protestations de
nombreuses associations de quartiers. Aujourd'hui
encore, il laisse des traces indélébiles dans
l'urbanisme de notre capitale et a changé complètement
son visage.
Sans doute, est-ce pour réconcilier l'homme de la rue
avec, ce qu'il faut bien appeler maintenant une hérésie
urbanistique, que la SNCB a laissé aux artistes "carte
blanche" pour marquer le coup des 50 ans de cette
jonction. Sous l'intitulé "Liaisons secrètes",
une vingtaine d'artistes investissent les couloirs et
labyrinthes souterrains de la gare centrale et
les habillent de leurs créations récentes : projets
multimédia, installations visuelles et sonores, photos, sculptures... A l'occasion également du cinquantième, la
rotonde Horta, ancien accès à la gare au départ de la
rue de la Madeleine et le salon royal seront
exceptionnellement accessibles au public.
La gare de la Chapelle investie depuis
plusieurs années par l'asbl Recyclart organise un
festival jusqu'au 6 octobre. L'occasion est belle
d'aller y découvrir les fresques et graffitis qui y ont
été créés.
Ce samedi 5 octobre, dans le cadre de la Nuit
Blanche, des documentaires et des films de fiction
seront projetés à la gare du Congrès. Tous sont
évidemment liés au thème du train et de Bruxelles. Enfin,
un bal populaire débutera à partir de minuit dans la
nuit du 5 au 6 octobre à la gare du Nord .
SUITE
En ce qui concerne les droits
d'auteurs merci de bien vouloir consulter la page
d'accueil
Plus de renseignements
à propos des festivités du 5àème de la jonction sur
le Site officiel de la
SNCB
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