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Cet été, comme l'année
passée d'ailleurs, nous sommes allés, mon épouse, les enfants et moi, en
Côte d'Opale. Il ne s'agit pas du type de voyage prestigieux
dont on peut rêver pour ce qui est de la destination,(mais le Touquet-Paris-plage tout de même !), il n'empêche que nous avons passé de
bons moments et que le bon temps nous a accompagnés, merci. Ce que
nous n'avions pas du tout prévu, c'est que, même en vacances, le
surnaturel ou tout du moins le paranormal allaient nous suivre, un peu
comme à la trace. Comme si je me baladais avec une étiquette
marquée "CERPI" sur le front. Et pourtant, je peux vous garantir
qu'aussi passionné de mystère que je puisse être, je n'avais aucune
envie de me lancer dans une enquête en ce moment, réservé au soleil, aux
distractions estivales traditionnelles, au dépaysement, etc.
C'est au cours d'une
petite escale dictée par une perturbation climatique imprévue que nous
nous sommes arrêtés à Ambleteuse, une petite localité à proximité de
Wimereux. Un char Sherman se dressait, imposant, à l'entrée d'un
musée consacré à la guerre 40-45, il pleuvait des cordes, l'occupation
du moment était toute trouvée d'autant qu'il était encore trop tôt que
pour passer à table. Je n'ai jamais caché mon intérêt pour la
seconde guerre mondiale, une passion qui me vient un peu de
mon père, de
nos
excursions à La Panne, quand j'étais gosse, alors qu'il y avait
encore des bunkers en veux-tu en voilà et que parents et grands-parents
n'hésitaient pas à nous raconter des histoires de ce temps là, le soir
au coin du feu. Il faut dire que "ce temps là" n'était pas si
éloigné à l'époque, il s'en fallait seulement d'une petite vingtaine
d'années. Quand je suis venu au monde, la guerre n'était terminée
que depuis 13 ans ! Pour les enfants (une fille de 13 ans, un
garçon de 15) les choses sont différentes. Pour eux, 40-45 c'est
presque de la préhistoire ! Mais la pilule pouvait encore passer
pour le garnement, jamais en reste pour ce qui est de ce qui permet
d'affliger plaies et bosses. Pour mademoiselle, la perspective du
musée de la guerre était beaucoup moins enchanteresse ! Quant à
Madame, c'est bien simple, elle serait bien restée dans la voiture,
c'est tout dire ! On le sait, le
débarquement du 6 juin 1944 n'a pas eu lieu en Côte d'Opale, mais plus
au Sud, en Normandie. Mais bien entendu, la région a été très
largement concernée malgré tout et c'est la raison de l'abondance de ce
genre de musées en cet endroit. Une tendance qui ne fait que se
confirmer au fur et à mesure que l'on descend le long de la côte
française, comme on peut le comprendre. Il était donc normal de
trouver là une carte Du Nord, du Nord-Pas-de-Calais, et de Normandie,
avec
la Pointe du Hoc et les fameuses zones de Utah, Omaha, Gold, Juno
et Sword, là où les choses sérieuses ont commencé (et aussi fini pour de
nombreux soldats...) Il est donc aussi tout à fait classique de se
situer sur cette carte par rapport aux événements qui eurent lieu
jadis... Normal aussi d'y repérer sa destination finale : le Touquet-Paris-plage. Une première petite sonnette d'alarme se
déclenche lorsque je lis, juste à côté :
Stella-plage ! Ah ça ! Comment ne l'avais-je donc
pas remarqué en préparant l'itinéraire ? (Euh... hé bien
probablement parce que j'ai laissé le GPS se débrouiller tout seul,
comme un grand, et que je me suis surtout intéressé au nombre de
kilomètres !) Or donc, sans le savoir et d'une manière très
virtuelle bien sûr, j'avais donc pris Mais le contexte du
musée revient au galop et je chasse cette idée typiquement cerpienne qui
n'a théoriquement rien perdu au milieu de mes vacances, n'en déplaise à
l'intéressée ! Et voilà que je donne certaines explications au
fiston : "Non ! Ce bonhomme bedonnant que tu vois n'est pas
Hercule Poirot, soi-disant natif d'Ellezelles,
la région des sorcières et de son célèbre sabbat, il s'agit
de Churchill, vraiment aucun rapport !"
A
l'heure où j'écris ces lignes, les dons de médiumnité de notre
correspondante Stella ne sont toujours pas reconnus par le groupement.
Peut-être aurez-vous lu qu'il existait de fortes présomptions, de
"grandes chances" comme on dit couramment, mais pour l'instant cela ne
repose toujours sur rien de précis, des tests doivent encore être
effectués, il faudrait certains éléments vraiment probants pour asseoir
la situation. Pourtant, on peut dire, je crois, que ces derniers
jours ont vu s'accroître encore le nombre des coïncidences qui prêchent
en sa faveur.
Fin des vacances oblige, il règne encore comme une parfum de farniente et
puisque l'histoire que je vais vous présenter s'est passée pendant
lesdites vacances 2009, je vous proposerai une narration un peu en
dehors des sentiers battus et de la présentation classique du CERPI.
Il s'agit presque d'un témoignage.
Or donc, c'est avec des motivations et des enthousiasmes mitigés que
nous avons commencé la visite, ponctuée d'une projection
cinématographique (en noir et blanc) d'une demie heure. Mais en un
clin d'oeil j'avais repéré le bon musée : un musée de toute beauté (pour
autant que l'on puisse s'exprimer ainsi vu le sujet !), superbement
fourni en matériel d'époque, parfaitement agencé, magnifiquement
documenté, bref intéressant. On est surtout fasciné par les
reconstitutions de scènes diverses (la bataille d'Angleterre,
le rôle du
Japon,
le débarquement,
la résistance,
la Sibérie ou la guerre en
Russie...) et
les mannequins qui se dressent fièrement,
en costumes
authentiques,
parés de médailles,
bardés de leurs armes réelles,
derrière des baies vitrées. Ayant reçu l'autorisation de
photographier, je ne me suis pas fait prier pour mitrailler en dépit des
nombreux reflets.
Bon ! Il s'agissait simplement d'une curiosité géographique, voilà
tout. Pas besoin d'en faire tout un fromage, même si l'heure
approchait...
Mais le voilà sur un autre sujet : "Hé bien oui, c'est bien
l'explosion
d'Hiroshima" - "Mise en pratique des théories d'Einstein, ce savant dont
les travaux pourraient avoir tant d'importance pour le CERPI, non? -
"Oui, mais ne pourrait-t-on pas parler d'autre chose ?"
Et c'est là qu'un soldat en uniforme, un canadien apparemment, se dresse
devant moi, semblant dire "Hands up !" ce qui ne manque pas de me faire
grogner in petto : (Stella insistait beaucoup sur les canadiens en ce qui
concerne les munitions retrouvées chez elle). Vu l'endroit où l'on
se trouve, personne ne criera au sortilège, mais me voilà face à
plusieurs vitrines qui, toutes, me lancent un message implacable à la
figure :
un chargeur quasiment du même type que
celui retrouvé chez Stella, les mêmes cartouches de 9mm
et
les longues aussi. Voilà
un Lüger, une
Sten, une Bren et des MP qui peuvent tous, indistinctement,
utiliser les mêmes projectiles ! Cela confirme à souhait que ces
"balles" pouvaient être utilisées par tous les belligérants, peu importe
le camp auxquels ils appartenaient. Mais une autre vitrine attire
mon attention : ce sont
des vestiges d'armes,
rouillées,
cassées, inutilisables,
parfois avec leurs étuis dans le même état. J'ai une espèce de flash, ou plutôt de
tourbillon : des images se télescopent dans ma tête sans que je ne puisse
réellement capter une idée précise. (On est manifestement au
moment du débarquement, cela n'a rien d'étonnant. Il règne un
chaos indescriptible, bien plus épouvantable que tout ce que l'on peut
imaginer, il y a une foule d'odeurs mélangées, des sons incongrus qui
fusent dans tous les sens, un brouhaha invraisemblable, des éclairs, des
cris, des ordres dans nombre de langues différentes. Impossible de
trouver un fil conducteur à cet ensemble de données enchevêtrées, d'en
retenir quoi que ce soit. C'est un fameux "foutoir" nauséabond,
inhumain et je me force à sortir de cette espèce de spirale qui donne le
tournis). Cette petite expérience de médiumnité improvisée a
quelque chose d'éprouvant, j'aimerais mieux que cela ne se reproduise
pas et pourtant il faut que je m'y attende : je n'aurai probablement pas
la paix tant que l'on restera dans ce musée ! J'aurais du y penser !
Mais quand j'y pense, c'est assez bizarre: ce n'est évidemment pas le
premier musée que je visite. Or je ne me souviens pas d'avoir eu
ce genre de flash auparavant. Par exemple,
le musée de Tervueren n'a rien suscité de particulier
(parce que le Congo se trouve trop loin ?) celui de la bataille de
Waterloo non plus (trop ancien ? De simples reproductions alors
qu'ici il s'agit d'objets véritables situés beaucoup plus près du lieu
réel des événements ?. Je n'en sais rien, il me semble d'ailleurs
que tout ces prétextes ne soient pas fiables... J'en suis à ces
réflexions lorsque l'on nous montre
l'intérieur
d'un blockhaus,
une scène de "comment les choses se passaient
en dedans,
quand c'était le moment" et me voilà reparti avec cette
fameuse
expérience du bunker.
Je la chasse à nouveau de mon esprit un peu en déroute, les choses
deviennent pénibles. J'ai l'impression de me trouver dans une
méchante usine à gaz où les tuyaux me font communiquer d'une époque à
l'autre, d'un lieu à un autre, au milieu d'un contexte qui me concerne,
directement ou indirectement mais étroitement, un drôle de labyrinthe ou
de puzzle dont je ne dispose ni du plan ni du modèle. Les baies
concernant
la guerre au Japon me sauvent un peu. S'il n'y avait
mon attirance pour les objets de
style asiatique ou les philosophies
orientales ce serait presque l'oeil du cyclone.
Fort heureusement pour moi, les représentations suivantes s'écartent du
sujet et me laissent donc tranquille. Il y en a de magnifiques et
notamment
un coin de rue tout entier du Paris au temps de l'occupation,
avec ses boutiques telles qu'on les trouvait alors et
exactement le type
de produits que l'on pouvait y acheter, des vitrines d'objets ayant
servi à Monsieur-tout-le-monde
ou réservées aux soldats allemands dans les années quarante, ceux qui
étaient utiles à la résistance, au sabotage, aux communications... j'en
passe. La visite se termine et je suis à la fois soulagé et un peu
déçu de ne pas avoir pu y consacrer plus de temps. Mais il faut
penser à tout le monde...
Les coïncidences ne se sont toutefois pas arrêtées là, loin s'en faut. On s'en doute, je n'allais pas en rester là et, une fois de plus, j'allais re-potasser toute la documentation possible sur le débarquement. Je m'étais bien juré de dénicher un livre tout particulièrement bien documenté sur le sujet et, dès mon retour. Il n'allait pas falloir de grandes recherches: lors des premières emplettes, le livre d'Antony Beevor allait se présenter à moi comme une évidence : D-Day et la bataille de Normandie !" OK, ce doit être un simple hasard, mais avouons que... et puis, non. N'avouons encore rien du tout, voyons plutôt la suite !
Comme nous l'avons dit,
le débarquement était loin de ne concerner que les américains. Il
y avait également de nombreux britanniques, des français, des belges,
des tchèques, des polonais et... des canadiens (pardon pour ceux que
j'oublie), sacrebleu : toujours ces fameux canadiens ! Or, il se
fait que si l'on consulte une carte des opérations, on voit que la plage
de débarquement la plus proche du Touquet était celle de Sword.
Celle-ci concernait essentiellement les britanniques, mais ces derniers
étaient bien chargés d'opérer la jonction avec les canadiens qui
débarquaient sur la plage immédiatement adjacente de Juno, soit
directement la deuxième par ordre de distance. Contrairement à ce
que l'on s'imagine peut-être, les opérations du débarquement allié ont
été très loin d'être un modèle de réussite, de synchronisation et
d'efficacité. La mer était très houleuse, beaucoup de soldats
étaient malades, les moyens de communication noyés sous les eaux étaient
souvent devenus inutilisables, si bien qu'il y eut de nombreuses erreurs
dans les lieux de débarquement. Certaines troupes se retrouvèrent
même parfois à plus de 15 km de leur destination ! Le chaos a été
vraiment indescriptible et quand les troupes ont commencé à se réunir,
on a vu des groupes composés presque exclusivement de gradés et d'autres
où de simples soldats devaient prendre le commandement ! Les
bombardements préalables furent loin d'êtres les "opérations à précision
chirurgicale" dont on nous parle tant. Au contraire, la plupart de
ceux-ci furent-t-ils parfaitement inefficaces, inutiles et de nombreux
assaillants, quand ils ne furent pas immédiatement tués, furent obligés
de faire de grands détours pour prendre pied dans les terres et arriver
en fin de compte à prendre les batteries côtières à revers. Tout
ceci fit en sorte qu'il y avait un sérieux mélange et qu'il était tout à
fait possible de trouver des canadiens beaucoup plus au nord, des
britanniques ou des américains beaucoup plus au sud, etc. Ce qui
est sûr en revanche, c'est que les canadiens dont
Il y a une autre coïncidence dans toute cette histoire. C'est que sans le savoir, nous sommes effectivement allés à Stella-Plage. Il se fait pour tout dire que, jadis, les localités toutes proches de Cucq, Trépied et du Touquet ne faisaient qu'une. Pour ne rien gâcher, c'est un belge qui a bien failli faire l'acquisition dudit territoire. Cependant, il n'a pas pu honorer le paiement et l'affaire est tombée à l'eau, comme il va si bien de dire en parlant d'une plage. Enfin, on le sait, le théâtre des opérations de Normandie était sévèrement gardé par les allemands, lesquels y avaient dressé le fameux "Mur de l'Atlantique". Ils étaient commandés en cela par le maréchal Erwin Rommel, le fameux Renard du désert. Et ce dernier avait établi son quartier général au château de la Roche-Guyon. Ce même château n'était autre que le lieu de résidence du duc de Larochefoucauld. Il s'agit bien sûr d'une personnalité qui devrait vous faire se dresser vos oreilles.
C'est en effet à lui que l'on doit la phrase : "La petitesse de l'esprit fait l'opiniâtreté; et nous ne croyons pas aisément ce qui est au-delà de ce que nous voyons". C'est cette fameuse maxime que l'on rencontre sur tous les documents du CERPI ! Nous en ignorions tout.
Et de surcroît, le château de la Roche-Guyon gagne vraiment à être connu car il est non seulement magnifique mais, en plus, il comporte son lot de mystères, de souterrains, de passages secrets sans compter un curieux donjon flanqué sur la colline à laquelle le château est adossé...SUITE -
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